Thetford #1 des collectivités entrepreneuriales au Québec

Thetford #1 des collectivités entrepreneuriales au Québec

REVUE DE PRESSE | SOURCE : www.lesaffaires.com | Édition du 25 octobre 2014, version papier page 12-13

Loin, très loin devant Montréal et Québec, la ville québécoise qui se distingue le plus pour son dynamisme entrepreneurial est... Thetford Mines. C'est l'une des nombreuses surprises révélées par le classement 2014 «Les collectivités entrepreneuriales», publié par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI), dont Les Affaires a obtenu copie.

PHOTO www.lesaffaires.com | Josselin Routhier et Sébastien Blais s'apprêtent à transformer le centre-ville de Thetford Mines avec un projet résidentiel et un projet hôtelier totalisant 24 millions de dollars. [Photo: Olivier Croteau]

Cette année, 121 villes canadiennes sont étudiées, soit celles qui comptent 20 000 habitants et plus. Selon Martine Hébert, vice-présidente et porte-parole nationale de la FCEI, «l'un des faits marquants cette année est que le Québec performe beaucoup moins bien qu'en 2013. Cette année, seulement cinq villes québécoises occupent le premier tiers du classement [parmi les 30 premières], contrairement à neuf l'année dernière. Il y a vraiment des efforts à faire pour se doter d'un esprit entrepreneurial.»

Les grandes villes québécoises font piètre figure : Québec se classe 82e et Montréal... bonne dernière. D'ailleurs, la plupart des grandes villes occupent le bas de la liste. Ainsi, Toronto est 110e et Vancouver, 101e. «Les plus grandes villes ont tendance à taxer plus et à dépenser plus, ajoute Mme Hébert. Elles sont moins sensibles aux besoins des PME.»

C'est en leur attribuant un indice relatif composé de 14 facteurs, regroupés en trois sous-groupes, que la FCEI classe ces 121 municipalités. La valeur de chacun des facteurs employés est déterminée par les résultats de sondages exclusifs ou par des données de Statistique Canada. Puisque certains sont exprimés en pourcentage et d'autres sous forme de ratios, ils sont tous pondérés sur une échelle allant de 0 à 100.

Enfin, certains indicateurs valent plus que d'autres. Les facteurs de la «présence» entrepreneuriale comptent pour 25 %, les facteurs du sous-groupe «perspectives», pour 35 %, et les indices de l'aspect des «politiques», pour 40 %.

Si l'aspect «politiques» a plus d'importance que les autres, c'est parce que la FCEI prend position en faveur d'une fiscalité allégée.

Louis Gaudreau, chercheur à l'Institut de recherche et d'informations socio-économiques, tempère la valeur de ce classement. «Je remarque que les grandes villes, comme Toronto, Québec ou Montréal, se classent très mal sur le plan des politiques publiques. Ces grands centres doivent réaliser des arbitrages entre divers groupes sociaux, elles n'ont pas comme seule préoccupation l'entrepreneuriat. [Le classement] donne une idée de l'activité entrepreneuriale, mais pas de sa qualité. Pour mesurer l'essor ou la vitalité d'une ville, ça prend plus.»

Quoi qu'il en soit, les 10 villes québécoises qui arrivent en tête de liste recèlent d'innombrables stratégies entrepreneuriales. Les Affaires vous fait découvrir les principales.

Les 14 critères du classement des villes entrepreneuriales

Critères « présence » pour 25 points

> Augmentation des établissements commerciaux ;
> Établissements commerciaux par habitant ;
> Proportion des travailleurs autonomes ;
> Proportion d'entreprises dans les secteurs de l'information et de la culture.

Critères « perspectives » pour 35 points

> Prévision du rendement des entreprises1 ;
> Prévisions d'embauche de travailleurs à temps plein1 ;
> État de l'entreprise1 ;
> Qualité de vie ;
> Nombre de permis de construction alloués (sauf les permis résidentiels).

Critères « politiques » pour 40 points

> Taux de taxation municipale et équilibre entre taxes résidentielles et taxes commerciales et industrielles ;
> Coût de l'administration municipale1 ;
> Sensibilité de l'administration à l'égard des PME1 ;
> Règlements municipaux1 ;
> Inscription à PerLE, un service en ligne pour le démarrage d'entreprise.

1 Critères mesurés par des sondages menés par la FCEI. Les autres critères sont mesurés grâce à des données de Statistique Canada ou de divers paliers gouvernementaux.

Sources : Rapport « Les collectivités entrepreneuriales », 2014, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, Institut de la statistique du Québec (les données démographiques sont des estimations pour 2013), ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations

1. THETFORD MINES

1er rang au Québec, 11e rang au Canada

Présence : 8,1/25

+Perspectives : 23,5/35

+Politiques : 31,7/40 = 63,3/100

Population : 25 675 (45e au Québec)

Développer une nouvelle qualité de vie

Non seulement l'ex-capitale de l'amiante a survécu à l'effondrement du marché de la fibre chrysotile, mais elle se classe maintenant première au Québec pour son dynamisme entrepreneurial. Un bond spectaculaire pour une ville construite par et pour l'industrie minière, qui y est éteinte aujourd'hui. Les Affaires s'y est rendu afin de connaître la recette de son succès.

S'il n'y a plus d'exploitation minière à Thetford Mines depuis 2011, les traces de ce passé sont visibles partout. La ville est entourée de hautes collines formées de résidus miniers, et les mines à ciel ouvert forment de profonds cratères laissés à l'abandon. D'aspect paisible, presque endormi, elle aurait pu, en toute logique, mourir à petit feu.

C'était sans compter sur la volonté de ses résidents, qui ont refusé de laisser le mauvais sort s'abattre sur leur localité. Deux d'entre eux, Sébastien Blais et Josselin Routhier, natifs du coin, s'apprêtent à transformer le centre-ville avec deux grands projets. Domaine Option Nature, un projet résidentiel, et la Cache du Domaine, un projet hôtelier, sont ensemble évalués à 24 millions de dollars.

«Les mines ont fermé, mais l'économie s'est diversifiée, expliquent-ils. Nous avons été sur le respirateur artificiel pendant sept ou huit ans, les gens attendaient que les mines redémarrent. Puis, on a dû se résoudre aux fermetures, et les shops ont grossi.»

«On n'a pas de problème d'emploi ici, assure Sébastien Blais. Beaucoup d'entreprises emploient des travailleurs à l'année. La semaine dernière, le site d'Emploi-Québec affichait plus de 150 emplois à Thetford. Ce qui manque, c'est la qualité de vie.»Aux grands objectifs les vastes chantiers. Au coeur de la ville, les deux associés sont en train de creuser un lac artificiel afin d'accueillir les amateurs de ski nautique et de planche, et de grandes compétitions dans ces sports.

Autour de ce bassin vient se greffer le projet résidentiel Domaine Option Nature, qu'ils développent avec l'aide et le soutien financier de deux autres partenaires. Ce sont près de 150 terrains, vendus environ 100 000 $ chacun. «À 4 $ ou 4,50 $ le pied carré, c'est quatre fois moins cher qu'en banlieue de Québec, affirme M. Routhier.» Déjà, une quarantaine de ceux-ci sont vendus, et les premiers travaux de construction devraient débuter au printemps 2015.

Les acheteurs sont libres de choisir leur entrepreneur, pour que «tout le monde puisse en profiter», affirment les associés. Certaines normes de construction doivent toutefois être respectées, afin de donner un aspect plus homogène au quartier et de conserver la valeur de revente.

En parallèle, ils développent le complexe hôtelier la Cache du Domaine, en partenariat avec les propriétaires de la Cache à Maxime, un établissement de la Beauce. Il s'agit d'un hôtel de 53 chambres qui surplombera le lac, auquel s'ajoutera probablement un spa. Un projet qui verra le jour à condition que MM. Blais et Routhier remportent l'appel d'offres de la Ville pour bâtir le futur centre des congrès municipal.

Le contrat devrait être attribué en janvier, espèrent les deux partenaires. «Permets-moi d'en douter», lance Josselin Routhier, laconique, quant au calendrier prévu. À Thetford Mines, le projet de construire un centre des congrès est reporté depuis une décennie.

Création d'un écosystème entrepreneurial

Parmi les 10 villes québécoises les mieux classées, Thetford Mines se distingue par deux aspects. La confiance des PME (calculée selon leurs prévisions de rendement pour l'année qui vient) y est nettement plus élevée que la moyenne, avec un score de 69,7. En contrepartie, les entrepreneurs sont également beaucoup plus nombreux, à 64,3 %, à penser que le coût de l'administration municipale pose problème.

«À l'extérieur de Thetford Mines, on ne parle que d'amiante, soutient Luc Rémillard, le directeur général de la Société de développement économique locale. Mais nous battons des records de croissance ! Un de nos atouts, c'est que les mines employaient plusieurs corps de métier. Quand elles ont fermé, ces travailleurs spécialisés ont fondé leur propre entreprise, parce qu'ils n'avaient pas le choix.

«Notre communauté a développé tout un écosystème d'entrepreneuriat. On organise même la semaine "Le goût d'entreprendre" dans nos écoles, où l'on sélectionne des jeunes de la 3e à la 5e année du secondaire pour un camp d'été d'entrepreneuriat gratuit», ajoute M. Rémillard.

Dans la région administrative Chaudière-Appalaches, où se situe Thetford Mines, le taux de chômage en 2013 était de 5,4 %, alors qu'il était de 7,6 % en moyenne au Québec. Selon les mêmes données du ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations du Québec (MÉIE), la situation démographique actuelle de la région va plomber la croissance. Selon les projections, la population thetfordoise devrait s'accroître de seulement 1,9 % entre 2016 et 2021 par rapport à 3 % au Québec.

Il y a donc pas assez de main-d'oeuvre pour occuper tous les postes spécialisés à pourvoir. Le salaire annuel moyen y est aussi moins élevé que la moyenne québécoise, soit de 25 859 $ comparativement à 26 347 $, selon les données du MÉIE pour 2012.

REVUE DE PRESSE | SOURCE : www.lesaffaires.com | Édition du 25 octobre 2014, version papier page 12-13