ANNIE RODRIGUE : De professeur d'art à artiste entrepreneure

ANNIE RODRIGUE : De professeur d'art à artiste entrepreneure

Si le mariage arts et affaires ne semble pas couler de source et que cette dualité rebute encore beaucoup de gens dans les deux sphères, l'artiste-peintre Annie Rodrigue se reconnaît d'emblée dans le profil d'artiste entrepreneure. C'est en utilisant les compétences et les techniques d'entreprenariat qu'elle a réussi à vivre de son art. « Je cherche les opportunités et je les crée. Le seul moyen pour un artiste-peintre de réussir, c'est de vendre! Il faut que les gens nous connaissent et qu'ils aient envie de se procurer nos œuvres », explique-t-elle.

Après avoir complété des études universitaires en arts visuels, en histoire de l'art et en enseignement, Annie Rodrigue a travaillé comme intervenante communautaire puis comme enseignante en arts plastiques et en arts dramatiques, tout en mettant au monde trois vigoureux garçons. C'est la maladie de son conjoint qui l'a amenée à ressortir du placard ses pots de peinture et ses toiles, comme un besoin viscéral de vivre et d'exprimer ses émotions.  Jumelant pendant un certain temps les deux carrières, celle qui signait d'abord sous le pseudonyme du collectif ProfessArt a décidé en 2012 de se consacrer totalement à sa création, des œuvres abstraites contemporaines expressives et originales. Et en peu de temps, mais en s'investissant  corps et âme pour sa passion, elle a gagné son pari d'en faire un bon gagne-pain.

De Facebook aux galeries d'art

L'art de cette citoyenne d'East Broughton a d'abord voyagé par les réseaux sociaux. Sa page Facebook est suivie par 7300 adeptes. « Ça m'a permis de me faire connaître, d'avoir une réponse instantanée, une appréciation du public sur mon travail », précise-t-elle. Pas moins de 90 % de ses ventes étaient attribuables au Web.  C'était avant qu'elle développe de nouveaux marchés et que sa cote d'artiste triple. Aujourd'hui, ça représente  moins de 15 %.

« Mon art est devenu entrepreneurial quand une connaissance designer d'intérieur m'a commandé des tableaux pour décorer des condos modèles », se souvient Annie Rodrigue.  À partir de ce moment-là, elle a profité de toutes les occasions de rendre visibles ses œuvres et de démystifier l'art abstrait, que le contact soit visuel ou virtuel, que l'intérêt provienne d'un collectionneur ou d'un simple amateur.

Le Web lui a aussi été utile au moment de frapper aux portes des galeries d'art.  Avec un anglais très moyen, c'est pourtant par courrier électronique, en utilisant l'outil de Google Traduction, qu'elle a effectué ses premiers contacts avec des galeristes des États-Unis et du Royaume-Uni, devenu son principal marché.  Le refus ou l'absence de réponse ne sont pas un frein pour cette fonceuse. Elle revient à la charge avec de nouvelles propositions artistiques au bout d'un certain temps.  Et ça marche!

De la même façon, elle est parvenue à signer un contrat important avec un éditeur américain qui reproduit ses images sur différents accessoires de maison, comme des toiles, des coussins ou même des rideaux de douche, distribués dans des grandes chaînes de magasin. Une maison de production cinématographique d'Hollywood utilise également ses toiles pour des films et des séries télévisées.

Ne craint-elle pas de corrompre son art et ses œuvres en les transposant en produit?  « Ça ne détruit  pas la valeur de mes toiles originales, c'est une publicité, une notoriété qui contribue à me faire connaître. On vit dans un monde d'images et ça prend des créateurs d'images. Je continue de créer des œuvres authentiques dans le respect de ce que je suis, pour exprimer mes émotions et m'améliorer, tant ma personnalité que ma technique. »

Tout en travaillant à développer de nouveaux marchés du côté européen et en portant fièrement ses deux casquettes d'artiste entrepreneure, Annie Rodrigue reste bien ancrée et engagée dans son milieu. Active au sein du conseil d'administration du Chemin des Artisans, elle est aussi conseillère à la Municipalité d'East Broughton, communauté qu'elle veut rendre créative et culturelle. Elle croit aussi que notre région,  grâce à son riche potentiel d'artistes et d'artisans, peut se démarquer et se développer culturellement, et ce, en faisant des partenariats naturels et aussi improbables que celui des arts et des affaires.

Source : Louise Nadeau
SDE région Thetford
418 338-2188